lundi 23 avril 2012

///▲▲▲\\\ - Void

Je vous attend, à me dire "Mais qu'est-ce que c'est que ce délire ?! Encore de la witch house de hipster retardé ??"
Pour ce qui est de witch house, je dirais oui - encore que - mais retardé, jamais. Ce n'est pas parce qu'un mouvement a beaucoup de choses à jeter qu'automatiquement tout est à jeter.
Voici donc ///▲▲▲\\\, que vous pouvez appeller Horse McGayver histoire de vous la péter devant vos potes (oui parce que allez dire que vous écoutez "///▲▲▲\\\" sans parler par langage des signes). Le projet n'a, à ma connaissance, livré qu'un EP : _v_o_i_d_.
Alors quid de ces dix petites minutes ?

Quatre chansons, quatre moments étranges. Noyé sous un amas d'effets sur-utilisés histoire de rendre le schmilblick digne d'une piqûre de mouche tsé-tsé, on navigue dans une électro rétro et acidulée. Le chant est torturé, parfois tellement saturé qu'on se surprend à entendre des relents noisy.. bref, void ne s'est imposé aucune limites et ferait une B.O. bien cool pour un Alice au Pays des Merveilles version pedobear (cf.la cover).
Au final, de la witch décalée et agréable à écouter. Sans révolutionner l'histoire de la musique, c'est planant à souhaits, plutôt prenant et très space!
Et puisque c'est gratuit, pourquoi s'en priver ?
(et si le lien ne marche pas)
Tape sortie et sold-out chez DreamDamage

dimanche 22 avril 2012

M.J.Tapscott & A.Kenower - Good Morning, Africa

 Le petit nouveau de chez Bookmaker Records est un mélange obscène entre Folk et Ambient. Oscène, oui, c'est le mot.

M.J.Tapscott, c'est monsieur Odawas. Et c'est en sachant ceci que l'on comprend d'où vient le côté pop-rêveur du disque. Tapscott s'occupe de la naïveté de la pièce, tandis que Andrew Kenower s'amuse à déployer des draps de field-recording, d'ambient et de délicatesse.
Tapisser ainsi un travail musical est un travail d'orfèvre.

A l'image de la relation cover-titre ("Good Morning, Africa" avec des manchots et des couleurs froides...) l'album est décalé.
Trente-cinq minutes totalement à côté de la plaque.

Tout ceci, l'univers de cette galette, me fait penser à un arc-en-ciel (encore un coup de la cover ?). Coloré, lointain, objet de désirs et d'admiration béate sans que l'on puisse y poser des mots. Une bijou pluvieux, mais réjouissant. C'est touchant.
Et un arc-en-ciel n'est jamais seul. Il est toujours accompagné d'un second. Et ce second, c'est les moments de réécoute. Autant un disque de Folk, je le passe une fois et je m'en lasse tant c'est "simpliste", autant ici la collaboration fait des merveilles. Beaucoup de sons. Vraiment beaucoup, ce qui permet de revenir après une dizaine d'écoutes tout en s'émerveillant autant sur les nappes abîmées de The Polo Ground ou sur la moiteur digne d'une mousson sur Who'll Stop the Rain. Et c'est un atout.
D'autant que c'est admirablement bien mixé (James Plotkin...). Tout feutré, discret. Aucun instrument ne bouche l'autre. Au contraire, c'est doux. Les petites réminiscences '70 revues façon XXIe siècle bien sombre passent sans problèmes, tant et si bien qu'une autre collaboration m'est venu à l'esprit, celle de Catherine Ribeiro + Alpes. Au niveau musical en tant que tel, pas tellement de comparaisons possibles. Mais au niveau de l'atmosphère, c'est un peu ce que ça donnerait modernisé et passé au filtre de l'ambient. Un disque proto-hippie, inclassable.
Car on a à la fois ces côtés "chansons qui restent dans la tête", mais aussi le fait qu'on ne pourra jamais le chanter comme du Ribeiro justement. La musique est trop floue pour ça.
Astucieux mélange pour faire revenir sur ses pas l'auditeur...!

Un album à la fois structuré et déstructuré. Troublant car il est paradoxal sans être manichéen. Sincère, nostalgique, authentique.
Un album timide, émouvant.
"Good Morning, Africa" se passe de tout égo. C'est une canalisation d'émotions, et l'humain étant de nature assez complexe, d'émotions qui peuvent se révéler contraires. On passe de la pluie au beau temps, de l'abstrait au concret, de l'ancien au nouveau. Une contradiction que l'on aimerait peut-être un peu plus poussée. Mais n'est-ce justement pas là tout le charme de l'album ? Le fait qu'il n'ose pas.
Encore une fois cette timidité.
Une très belle aventure hors du temps, avec quelques rappels à la réalité, comme si on était soudainement passé de l'autre côté du miroir.

Pour acheter c'est sur le site de Bookmaker !

Mastering by James Plotkin, dudes!

petit lien pour le bandcamp de bookmaker qui livre des choses intéressantes

samedi 21 avril 2012

Mange tes Morts #02

Mange tes Morts #02

Argh, déjà une semaine sans chroniques !
Pour la peine, voici un petit MtM qui, je l'espère, en ravira plus d'un. Il y en a une fois de plus pour tous les goûts. C'est parti!

01 - Sutekh Hexen - Larvae [noise, black metal, USA, Handmade Birds]
02 - ∆AIMON - Flatliner [neo-synth, witch house, xxx, Tundra]
03 - Brother Sun, Sister Moon - S/T [pop, post, New-Zealand, Denovali - CooperCult/BLWBCK]
04 - Hexvessel - Vainolainen [folk, ritual, UK, SvartRecords]
05 - Sektarism - Le Son des Stigmates [funeral doom, black, France, Necrocosm]


samedi 14 avril 2012

Mange tes morts #01

Mange tes Morts #01


Lancement d'un nouvel article, le MtM. Mange tes Morts est un petit mix, sans ligne directrice, seulement cinq découvertes de la semaine, avec extraits. On passe du Black au free jazz sans aucune forme de pitié, pour le grand bonheur (?) de vos oreilles.
C'est parti.

01 - Book of Sand - Mourning Star [black metal, contemporain, Minneapolis, MusicRuinsLives]
02 - Dictaphone - Poems from a Rooftop [jazz, electro, Berlin, Sonic Pieces]
03 - Teatro Satanico - Fatwa [electro, synth pop, Italie, Old Europa Cafe]
04 - Pathétique Poupée - 01010000 01101001 01101111 01110010 [noise, free, Rio de Janeiro]
05 - Oaks Of Bethel - Orange Triad [doom, black, US, EEE Recordings]

jeudi 12 avril 2012

Dødsengel - Imperator

Le Black Metal Norvégien, tout le monde le connait - ou du moins, devrait. Pilier de la haine, de la noirceur et de cet esprit "moitié-rêve moitié-rage", il nous a inondé les oreilles tant et si bien que beaucoup, de nos jours, continuent à suivre cette école.
Dødsengel a beau être norvégien, c'est un duo plus qu'original.

C'en est devenu chiant. Ne sortir que des perles, il y a un moment où ça devient indécent. Nous sommes à peine entrés dans l'année 2012 que déjà sort ce qui pourrait être album de l'année. Oui, pourrait.

Imperator est tout d'abord forgé dans le Metal Noir le plus pur, le plus rude et coupant. Si ce n'est tranchant. La batterie blast, frappe et écrase tout ce qui se trouve sur son passage, tandis que les guitares sont formées d'un mix parfaitement calibré entre son incisif et lourd ; sourd. Mais notre Ange Mort est loin, très loin de se conformer aux règles du genre. On pourrait dire qu'il s'ancre même merveilleusement dans le mouvement Orthodoxe. Ou du moins dans la vague Acherontas / Urgewalt... Occultisme de tous bords, gnose et obscurantisme côtoient une orgie de puissance et de haine, cri droit sorti des cieux. La révélation par la néantisation sonore.
Mais trêve de prose.
Psychédélisme amer et prières arides se mêlent dans un BM d'excellente facture, où, je le disais, l'originalité est de mise. Sur ce double-CD, énormément de pistes ambiantes, et pas mal de passages sous la forme de mantra - on a même l'impression que le chant est en fait pensé comme un tout et non pas chanson à chanson.
Le groupe implémente tant des riffs acidulés à la Ash ra Tempel que de bonnes choses bien agressives, comme on l'aimait sur l'éponyme. On pense aussi beaucoup à l'Égypte antique, toute la mythologie remonte - et inévitablement le Lucifer Rising du père Anger.
Le tout reste assez "doux" et aérien. Tenir deux albums d'un coup n'est pas chose aisée, et pourtant c'est avec plaisir que l'on se perd dans la musique du duo norvégien. La magie opère, si bien qu'il en est parfois difficile d'y comprendre quelque chose. La guitare s'est mise à ressembler à du saxo à un moment...
Le chant quant à lui est plus grave, plus profond et plus osé. Rebutant au début, il s'avère être une force pour l'album. Il ajoute une gravité indéniable.


Un peu dans la veine d'un Paracletus (Deathspell Omega, ndr) qui se serait perdu dans les méandres des qliphoth ("coquilles" en hébreu, symbolisant les impuretés de la matière dans la Création).
Rien qu'à la - magnifique - cover, on le voit. Solaire, stellaire, avec cet homme tête en bas gardant ainsi la base de l'hérésie black metal, mais avec ces dessins sur le corps, très kabbalistiques. N'étant pas féru d'arts occultes, je pense tout de même pouvoir dire que le groupe est dans une approche plus près de la Golden Dawn que du satanisme primaire. Pas d'inversion mais de l'introspection!
Car les 2h30 de cet opus sont plus proches du rituel que de la simple musique. Une chaleur dans le son, comme une flamme. Par un processus étrange, les chansons sonnent comme des incantations, prêtes à vous happer dans la folie cosmique. Là où le Black Metal a souvent une approche très terre à terre, Dødsengel est un appel au cieux.

Le groupe nous confirme une fois de plus sa maestria et, comme il le disait très bien lui-même :
"Your God is dead, your ideals are dying. From the underworld, I give on to you a word to conquer the Aeon."
Ce mot le voici ; et c'est plus qu'un mot. C'est un album qui souffle tout sur son passage, un album mature. Le groupe a trouvé une identité. On le sentait arriver avec l'éponyme, plus abouti déjà que Mirium Occultum. En voici la suite, occulte, aveuglante. Entre le dernier 777 de BAN et du Darkspace, en bien plus chaud.
A déguster très attentivement, car il faudra sûrement une centaine d'écoutes pour en capter toutes les finesses.
Je n'y trouve rien à redire.

בְּחָכְמָה יִבָּנֶה בָּיִת וּבִתְבוּנָה יִתְכֹּונָן׃

Pour écouter des extraits
Pour acheter chez Terratur

mercredi 11 avril 2012

Sghor - Maranathata

Sghor commence à officier dans les rangs noise / ambient dès 2004, où il n'est alors qu'un petit nom, noyé au milieu de l'immensité underground. Après huit disques dont un split, nous voilà en compagnie de Krzysztof M. pour une ballade des plus nostalgiques.

Il faut l'avouer, c'est avec ce disque que je découvre Sghor. Ici, cinq pistes pour cinquante minutes au total (je vous laisse faire le calcul du temps moyen par chanson). Un voyage qui ne s'avère donc pas court, mais pas non plus insurmontable.

Maranathata s'avère être doux, simple. Les quinze minutes de "The Happening" qui nous font entrer dans le disque sont on ne peut plus calmes et "faciles", mais elles ont le mérite d'être une bonne porte d'entrée - peut-être un peu longue et en marge de l'album ? Field-recording (qui nous suivra tout au long de l'album) de bruits nocturnes et longues plages de synthé pour un rendu éthéré et reposant.


Alors aux traits très "naturels", comme l'aurait fait un Apoptose, il est assez déconcertant de voir que le reste de l'album est axé bien plus moderne, si ce n'est futuriste. On en viendrait pratiquement à Future Sound Of London! Alors oui, vous allez me dire "halalah, Ω, tu abuses un peu, les styles n'ont rien à voir, arrête d'étaler ta culture!". Eh bien si. Il saute à l'oreille que les sonorités de The Happenning sont très différentes du reste de l'album, bien plus crissant, presque métallique et rouillé. Un joli portrait d'un avenir aussi pluvieux que livide. Alors oui, si, le lien avec FSOL est simple : ce son électronique et rond aux morbidesses futuristes et aux allures collage sonore. Ce qui est troublant, voir même dommage, c'est qu'on se sent en plus de ça tiraillé par une chanson qui résume ces cinquante minutes en... tout juste quatre. Coldworld : Winterreise.

L'univers de Sghor n'est pas au beau fix, et malheureusement son inspiration non plus. On sent une maîtrise du mix, et de l'immersion. On a envie de rentrer dedans. Mais après quinze minutes, c'est un choc de changer d'univers. Alors l'immersion perd de son charme, on se sent comme dans un jeu vidéo : il faut faire travailler sa cervelle. Les images ne viennent plus d'elles-mêmes, et le sentiment de nostalgie, pourtant bien parti pour durer, s’efface dans des sons trop urbains - qui ne collent pas au style d'ambient usité.
La production y est, et il est vrai qu'il est assez difficile de critiquer un disque bien fini. Mais il manque la patte, il manque l'inspiration. On s'emmerde. Les pistes ne se suivent pas, et on sent ici que Sghor lorgne vers autre chose.

 

Mais ce Maranathata est un album concept, et l'homme derrière celui-ci nous explique tout ici. Tout ceci lui serait arrivé, et cet album n'est en fait que l'enregistrement ce ce passage mystique de sa vie. Les grenouilles du début du disque, et le changement vers un son plus industriel ne sont en fait que les formes sonores de ce rêve (?), coïncidant ainsi à quelque chose. Conceptuel, certes, mais aussi très personnel. Car si pour Sghor, cet album a une réelle signification, pour nous autres, il est difficile de rentrer dans les pensées et de ressentir ce que lui a pu ressentir.
Un album qui a donc le mérite de se tenir, du moins dans l'idée, et d'être bien produit et plutôt bien enregistré.
Mais, sans mauvaise foi aucune, on ne rentre pas dedans. On s'y embête. Un rêve ou une révélation est quelque chose de personnel, tandis que la musique est elle, une chose partagée. Les rêves sont fouillis, la musique, elle se doit d'être "claire" si elle est s'étend sur une longue durée.
Dommage, donc...

 

Pour écouter
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samedi 7 avril 2012

S/V\R - Célébration Noire

S/V\R (prononcez "Sévère") m'a retourné. Après une douce entrée en matière, des incantations murmurées, saturées, oubliées, je me suis montré oublieux et je n'ai pas pris mes précautions face à la suite de la tape. Moi qui pensait me retrouver face à un genre d'éléctro calme!
Je crois me souvenir avoir sursauté.

Je mettrai tout de suite deux ou trois références, pour ne pas avoir à citer après.
Diamonda Galas. Carilon Del Dolore. Haus Arafna.

S/V\R c'est donc S., de Menace Ruine et Chanoine. Duo qui nous vient du Québec (Montréal et Québec, Levis plus précisément). Et qui donne dans un style étrange qu'est la rythmic noise. En gros, vous prenez de la noise, et vous ajoutez des rythmes, prenants, surprenants mais surtout déments.
Bien que ce ne soit - je pense - absolument pas une influence du groupe, j'ai tout de même pas mal pensé à White Ring, qui livrait dans sa witch house des éléments froids, durs et somme toute avec cet "ésotérisme", hipster diront certains, mais... tout de même très prenant. White Ring qui est d'ailleurs sorti chez HandmadeBirds lui aussi (on en parle ici).
Bref, c'est glacial, grésillant, effrayant. Et pourtant, on prend grand plaisir à écouter et réécouter les plages livides des synthés. Alors, révélateur de notre masochisme ou mélange parfait entre folie et fièvre du samedi soir ?

Il faut en tous les cas mettre les points sur les i. Le son est vraiment vraiment étrange, et extrêmement puissant. Imaginez celui que ferait une batterie, mixée façon grosse bertha avec tout de même un zeste de son années '80 qui persiste (comme la batterie de 0.38 à 0.44 ici, la froideur et le côté sacro-sombre du duo en plus). Car oui, cela fait de cette Célébration Noire une écoute éprouvante.
La frustration et la retenue qui découlent de la "punition" - thème que l'on retrouve aussi dans Perdue / Abattue au final - transpirent dans ce double-son synthé / percussion. Une dualité qui se révèle à la fois dure et discrète. Le Durcissement de la discrétion. L'explosion d'une retenue trop grande qui s'affiche à travers des riffs surpuissants, sur lesquels on aurait presque envie de headbanger. Tout cela n'est pas sans rappeler la puissance feutrée du magnifique In Vulva Infernum, de Menace Ruine. Ce qui en soit n'est pas étonnant, certes, mais écoutez un peu Omnia In Nihil. La ressemblance est frappante ! S. aime définitivement ces percussions rituelles au tempo de la mitraille.
Une angoisse enroulée, comme une tentative de communication d'un homme qui n'aurait jamais parlé.
Quoi qu'il en soit, le son oscille entre power noise ("Les gestes de l'amour") et candeur désespérée ("Une joie qui finit"), jusqu'à ce que mort cérébrale s'en suive. Jusqu'à l'épilogue, quintessence de l'album, où se mélangent un rythme à peine susurré, et une noise en stéréo (3D comme dirait l'autre) qui vous tuera les tympans, si ce n'est déjà fait.
Alors, si ce n'est pas fait, faites-le bien. Faites-le avec S/V\R.

On achète ici
On écoute un peu là
Et aussi en dessous !
Merci à S. pour sa confiance !


Ce mastering de J.Plotkin... magnifique.

mercredi 4 avril 2012

Mhönos - Humiliati

Quand on parle ésotérisme en musique, un nom revient très souvent : celui d'Halo Manash. Et par le même coup le label Aural Hypnox. Il est vrai que, s'ils ne sont pas ceux qui ont implémentés le rituel et l'ésotérisme dans la musique, ils ont su toucher avec leur sincérité, mais aussi leur approche dévouée. Tout comme le mouvement du Black Metal Orthodoxe, c'est une musique, mais aussi un univers qui forment un Tout.
Cet ésotérisme sonore est né assez tôt - après avoir obsédé des générations d'inquisiteurs avec le triton, etc. - mais a vraiment trouvé son point culminant peu après la vague Led Zep, dans les années 80-90 avec Coil, Throbbing et toute la scène indus. En incorporant le rituel, la magie sigillaire (Spare, Crowley), et en introduisant l'occultisme, ces "industrial children" ont marqués les esprits.
Et aujourd'hui, on assiste une sorte de renaissance de ces mouvements. Yoga, la réponse black metal à Throbbing Gristle, Murmuüre, digne successeur de Peter Christopherson, Hexentanz worship Karma Zero, Dødsengel qui est entrain de perpétrer la parole du Malin à travers sa magie noire...*
Sans pour autant faire un dossier à propos de l'occultisme dans la musique, je trouvais important de situer.

Mhönos fait partie de ces groupes dont on entend peu parler. (Il faut dire que l'Art Noir vient à vous, et non l'inverse...) Et qui justement fait partie de cette nouvelle mouvance au fond abscons.
Mhönos est lourd, abyssal, mystique. Là où Esoteric donne dans un Doom remarquablement bien composé, qui se tient de part en part, tirant les larmes, cet Humiliati regorge de coins d'ombres improvisés, noyés dans les ténèbres infernaux. Improvisation rituelle ou non, la musique me rappelle les instants magiques que j'ai passé avec Sepvlcrvm et son étrange Hermeticvm (I). Même type de structure : ossature légère, mais noir charbon ; véritable plongée dans les profondeurs de la terre. Le chant, grave, lent, semble Invoquer quelques divinités aux noms imprononçables, tandis que la batterie vous assène, frissonnante, des coups mortels sur le crâne. Les guitares répètent encore et toujours la même liturgie, pour des pièces d'une demi-heure en moyenne. La transe s'amorce rapidement, et s'ancre dans votre chaire. Le sceau s'imprime en vous, insidieux.

Un Doom aux riffs psyché,  qui lorgne vers Sektarism pour le côté occulte vraiment proéminent ; un rituel captivant, qui mène aux confins de la folie. On pense réellement plus d'une fois à tous ces groupes, tant les sonorités sont indescriptibles.
Les structures chaotiques rencontrent des instru pratiquement electro sur "Ex nihilo... Ad nihilum...", on ne sait plus où se mettre. La batterie semble un tambour en peau humaine, mais elle n'est pas seule, car accompagnée de bol tibétain, et autres petits ajouts qui ne font que renforcer l'orientation "Art Noir" de ce bijou en terre stérile.
Le Paraître rejoint l'Être, profond, poisseux, envahissant.

Un Electric Wizard qui a trop regardé r.A.S.H.n.k.a-RA, donc ?
Pas loin. Mais ma foi, une perle de plus que j'ajoute avec plaisir à ces chroniques.
Ensorcelant.

... et Les Urnes Comme Ignescentes Firent s'Evader les Rois.

Une autre bonne raison pour acheter ? Le packaging démonte.
On trouve ça chez Le Crepuscule du Soir !
Et pour écouter.

* : cherchez les sons par vous-même, cette fois.

lundi 2 avril 2012

Alva Noto // A.Moor // A-J.Chaton - Décade

Les "pop", les "clac", les "bip". Autant de craquements que l'oreille s'est habituée à écouter avec les bobines des vieux films. Recherches minimales. Concrètes. Electro. La pureté de la musique, retour dans le passé, dans le son d'un monde sur écran, muet. Le film. Mémoire sourde, ancrée dans chaque mémoire. Ces "clics", ces "shhh". Reconstruction musicale de bruits, inexistants au quotidien, mais inévitablement liés à lui par les pellicules qui l'ont filmé. Cet "infini du silence matérialisé" comme dirait Éric Loret.

Huit jours pour une décade.

Alva Noto nous y a habitué, à cet étrange froideur, depuis les années 2000. Son dernier né Univrs en est l'exemple flagrant. Des pops doux, éphémères, des rythmes simplifiés, musique désincarnée et sans aucun artifice. Machinal, mais pourtant si humain. Source de la musique, simplifiée, simplifiée, simplifiée, qui tente par moments de s'extraire de sa condition, de muter dans son carré de 0 et de 1.
Mais DÉCADE n'est pas uniquement Carsten Nicolai. C'est aussi Anne-James Chaton (poète sonore qui a travaillé avec The Ex, Carsten...) et Andy Moor (The Ex). Réunion de fidèles, donc.

Alva Noto s'écarte de ses plongées habituelles dans un océan de "chhh" décharnés. Ou plutôt, il conserve son style, mais l'oriente vers un nouveau genre.
Là où Univrs était vraiment une néantisation de la musique, ce nouveau travail s'oriente vers des sphères beaucoup plus contemporaines. Il tirait et revenait à l'essence du son, puisant dans les rythmes millénaires (la musique - humaine du moins - vient de la percussion). Aujourd'hui, ce trio s'oriente vers ce que j'aurais l'audace d’appeler de la "cinématographie sonore". Bruissements Kodak et coupure de courant dans la salle.
Cinématographie à cause du travail sonore de C.Nicolai, donc, mais aussi à travers le travail de poésie de A-J.Chaton. Le spoken-word prend une tournure étrange, mi-anglais mi-français, avec un accent troublant (quelle voix, ce monsieur Chaton!) et même certains textes en japonais. Une histoire décousue du quotidien. C'est glacial, c'est machinal ; routinier.
On sent la petite patte de The Ex, aux guitares. Discrètes mais inspirées.
La tristesse pratiquement nihiliste des déplacement d'un homme, qui vit. Qui vit pour vivre. Il est. Il bouge. Il voyage. Parfois, il téléphone.
Glaçant.

Une œuvre assez totale, assurément urbaine. Éthérée. Musique contemporaine minimale teintée de post-punk.
On se sent coincé dans les rails d'un métro, à écouter ce dernier passer, revenir, repasser. Sa bio à la main. Une bio où il n'y a rien. Sauf des moments que l'on pense insignifiants de notre vie, et qui pourtant la constituent.
Si vous n'avez pas peur des explorations sonores, chaudement recommandé.

Débrouillez-vous pour trouver.